Dans ma famille, nous avons toujours appelé ce plat Ca Kho. Il s’agit de la recette de ma grand-mère paternelle, qui était originaire du Tonkin. Elle a toujours eu sa version singulière des recettes emblématiques du Vietnam. Dans sa recette du Ca Kho, pas de sucre caramélisé, ni de ciboule ou de piment. Elle y mettait du gingembre et du thé au jasmin ! Pour le Bun Cha, pas de viande hachée mais des petites lamelles de poitrine de porc directement marinées et grillées. Elle cuisait les Banh Cuon dans une poêle à crêpes au lieu de les cuire à la vapeur. Elle mettait des chanterelles dans l’omelette vietnamienne. Bref, elle s’adaptait à ce qu’elle trouvait en France au final.
Le Ca Kho est l’un de mes plats vietnamiens préférés je pense. On ne peut pas faire plus concentré en saveur « umami » ! Entre la sauce soja, la sauce de poisson et le gingembre, puis le thé jasmin qui vient faire exploser le tout. D’ailleurs, l’utilisation du thé jasmin pour faire mijoter très lentement le poisson est si originale je trouve. Et la couenne de porc est vraiment un élément important du plat. C’est sans doute l’une des meilleures associations « Terre/Mer » que je connaisse en cuisine. En fait, c’est super malin.
Premièrement, cela permet de ne rien jeter. En effet, la poitrine de porc est la pièce de viande la plus utilisée dans la cuisine asiatique. C’est un morceau de choix. Un subtil mélange de gras et de viande qui donne un moelleux et une saveur parfaite aux plats. Lorsque dans certains plats vous devez retirer la couenne de la poitrine de porc, pour l’utiliser sous forme hachée dans l’omelette vietnamienne ou les nems par exemple, plutôt que de la jeter vous pouvez l’utiliser dans ce plat ! Zéro déchet 🙂
Deuxièmement, le gras du porc va fixer tous les arômes du plat et les diffuser en fusionnant avec le jus. Il va lui donner toute sa profondeur. La gélatine contenue dans la couenne va donner de l’épaisseur, de la rondeur et de la douceur.
Troisièmement, la couenne est stratégiquement placée tout au fond de la casserole évitant ainsi à la chair du maquereau d’être en contact direct le fond de la casserole. Le poisson cuit donc à basse température, n’accroche pas au fond de la casserole et sa chair ne s’abîme pas.
Et puis, vous ne serez pas obligés de la manger si vous n’aimez pas ça. Bien que vraiment, ce soit à mon sens la meilleure partie du plat, qui concentre toutes ses saveurs. Mais j’insiste, c’est un ingrédient vraiment important qui va faire toute la différence. Considérez-la comme une épice. Comme une feuille de laurier dans un plat en sauce : elle apporte tout son parfum, puis elle finit au compost une fois qu’elle a fait son job !
Enfin, dans la plupart des version du Ca Kho, on trouve le pangasius, le poisson chat ou encore du saumon… Ce ne sont pas les poissons les plus « éthiques », ni les plus « écologiques », ou encore moins les plus « sains » qui soient sur les étals des poissonneries françaises.
En revanche, le maquereau a été déclaré « Bon, Propre et Juste » par l’association Slow Fish (« branche poisson » du mouvement Slow Food). Il est représentatif d’une pêche réellement durable. En cuisson douce et lente, la chair du maquereau ne libère pas d’odeur forte et reste très moelleuse.
Evidemment, c’est un plat qui gagne en saveurs et en moelleux le lendemain, lorsqu’il est réchauffé. Alors ne vous faites pas prier sur les quantités 🙂
Ingrédients :
- 2 à 3 gros maquereaux
- De la couenne de porc
- Un gros morceau de gingembre frais
- 1 tomate ou 3 c. à s. de chair de tomate en boîte quand ce n’est pas la saison
- De la sauce de poisson fermenté
- De la sauce soja
- Du thé jasmin
Préparation des différents ingrédients
Vider et rincer les maquereaux. Puis les découper en gros tronçons.
Découper le gingembre en grosses lamelles d’environ un demi centimètre.
Couper la tomate en quatre.
Découper la couenne de porc en gros morceaux.
Infuser le thé jasmin : environ une c. à c. de thé pour 20 cl d’eau.
Cuisson du Ca Kho
Placer la couenne de porc au fond d’une casserole. Puis disposer les tronçons de maquereau par-dessus.
Ajouter le gingembre et la tomate.
Arroser le tout de sauce de poisson et d’une c. à s. de sauce de soja.
Enfin, verser le thé au jasmin filtré et tiède sur le poisson jusqu’à le recouvrir complètement.
Couvrir et laisser mijoter à feu doux environ 45 minutes.
Déguster avec un riz blanc parfumé et laissez-vous transporter par les saveurs de ce bouillon hautement aromatique.
Lecture passionnante merci pour cet article